Cette technique énergétique japonaise est de plus en plus pratiqué dans les hôpitaux
Redécouvrir le toucher. Ce sens particulier qui peut avoir de grandes vertus pour soulager les individus en souffrance. De plus en plus de services hospitaliers français l’ont compris et ouvrent leurs portes au shiatsu. Parmi les « MAC » (médecines alternatives complémentaires), ce soin occupe une place à part : il s’appuie sur les principes de la médecine chinoise et consiste en des pressions (atsu) des doigts (shi) et des paumes sur les points clés du corps, dans le but de le rééquilibrer.
Originaire du Japon, il se pratique sur un patient habillé, allongé sur des tatamis ou des tapis de sol. Le praticien, à genou auprès de lui, établit un protocole de pressions, d’étirements ou de frictions sur l’ensemble du corps, afin de lever les éventuels blocages des canaux énergétiques, appelés « méridiens », et des points d’acupuncture. « Le toucher est universel, il atteint toutes les sphères de l’individu, précise Bernard Bouheret, fondateur et maître de l’E.S.T (Ecole de Shiatsu Thérapeutique) à Paris. Il est à la fois maternant car il enveloppe l’individu et paternant car il est rythmé et incite la personne à avancer. »
Une discipline holistique qui incite à revenir à ses rythmes intérieurs
Comme beaucoup de soins orientaux, le shiatsu est une discipline holistique qui prend en compte l’individu dans sa globalité. « Nous sommes dans des sociétés virtuelles où les gens vont très vite et où l’alternance entre le travail et le repos n’est plus respectée, poursuit le praticien. Or, la médecine chinoise a toujours veillé à l’alternance entre le yin (le repos et le calme) et le yang (le dynamisme et l’activité). Le shiatsu va inciter l’individu à rentrer à nouveau dans ses rythmes intérieurs. Il va aussi rééquilibrer les trois foyers qui structurent l’homme : le corps, les émotions et l’esprit. »
La relation bienveillante qui se noue entre le praticien et le patient donne lieu à un toucher qui peut s’avérer libérateur et précieux face aux rythmes soutenus de la société moderne. « Le shiatsu est particulièrement efficace en cas de pathologies du système nerveux, d’origine psychosomatique ou de stress ainsi que pour soulager les douleurs, les maux de tête, de ventre ou du dos…, estime Bernard Bouheret. Les médecins m’envoient beaucoup de patients. »
Le titre de “spécialiste de shiatsu” reconnu
Les méridiens issus de la médecine chinoise
Au Japon, la discipline est reconnue par le ministère de la santé et il existe un diplôme d’état. En France, le shiatsu a été introduit par le maître japonais Shizuto Masunaga et plusieurs instances représentent la profession, comme la Fédération Française de Shiatsu professionnel (FFST), le Syndicat Professionnel du Shiatsu (SPS) ou l’UFPST (Union française des professionnels de shiatsu thérapeutique). Il existe près de 70 écoles et en 2015, une VAE (Validation des acquis de l’expérience) a été délivrée par la Commission Nationale de Certification Professionnelle pour le titre de « spécialiste en shiatsu ».
Une partie du corps médical a compris l’intérêt de proposer des séances à leurs patients. « Nous allons lancer une recherche clinique à l’Hôpital Henri Mondor sur la pathologie de l’amylase cardiaque, affirme Jacques Laurent, du SPS.
Il existe une dizaine d’évaluations du shiatsu dans le monde et trois recherches cliniques mais il y a de plus en plus de praticiens en milieu hospitalier. Les services de psychiatrie l’utilisent beaucoup, comme à l’hôpital de Ville-Evrard dans le 93. »
Il permet la baisse de l’anxiété et de la consommation de médicaments
Depuis cinq ans, le service de pédopsychiatrie de la Pitié Salpêtrière à Paris accueille aussi chaque semaine des praticiens de l’EST pour faire bénéficier des adolescents en difficulté (dépression, troubles du comportement, rupture sociale…) d’une séance de shiatsu. L’école organise aussi des ateliers à l’hôpital Cochin et à Necker, pour le personnel de l’hôpital et enseigne la discipline aux aides-soignants de Cochin, depuis 4 ans.
« Le shiatsu aide toujours l’hospitalisation, constate Benedicte Seguin, qui a pratiqué pendant six mois à l’hôpital Dupuytren de Draveil, au service d’onco-gériatrie.
Les patients sont souvent isolés et alités, ils ont des douleurs et prennent des médicaments… Le shiatsu a permis la diminution de leurs troubles anxieux, des insomnies et les médecins ont constaté une baisse de la consommation de somnifères et d’anti-dépresseurs. C’est une autre forme de présence différente et un toucher moins médical, qui leur apporte un apaisement que, malheureusement, le personnel hospitalier n’a pas toujours le temps de dispenser. » Un vrai soin, dans le sens ancestral du terme : englobant et bienveillant.
Charlotte Langrand
Kitchen théorie – 3 février 2019
Pour aller plus loin
Un documentaire, « la voie du shiatsu », a été édité l’année dernière. En plus d’une présentation du shiatsu, du Japon à la France, il donne la parole aux praticiens et à leurs patients, afin de montrer la nature singulière de leur rencontre par le toucher et les bienfaits qu’ils constatent sur leur bien-être, depuis qu’ils reçoivent ce soin énergétique.
La voie du shiatsu, par Bénédicte Seguin et Mylène Pierrard, aux Editions Montparnasse et chez Nature et Découvertes, 30€.
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